Ça fait des mois que je suis coincé avec une jambe brisée, et ça fait des mois que je veux visiter deux avions de la grande guerre, abandonnés sur le tarmac d’un aérodrome inutilisé. Plusieurs semaines ont passé depuis la première tentative et, une fois encore, je me suis estimé capable. Sax le pensait aussi, vu le programme : l’aérodrome désaffecté, une cuvette où coule une source vosgienne, et une petite marche vers un oppidum vieux de 2000 ans. Les zincs étaient époustouflants, resplendissants, et si simples à trouver que nous finîmes accompagnés d’urbexers polonais… On s’est baladés dans le plus gros et j’ai réussi à infiltrer – puis m’extirper – d’un cockpit d’avion de chasse sans me faire mal. Preuve que j’allais incroyablement mieux !
C’était si important qu’on a perdu du temps sur place, sans trop songer à l’endroit où dormir. Nous avons fini par reprendre la route et, passé vingt-trois heures, nous avons atterri aux abords d’une base de loisirs sur un immense lac, entre des rangées d’arbres. Laska est immédiatement partie se foutre à la flotte et je me suis écroulé dans mon hamac, la jambe en feu, sans glace, tramadol, ni vodka.
– Ça va, ma gueule ?
– Impeccable.
Sous les étoiles scintillantes, cette nuit-là aussi, avait quelque chose de magique. Sax s’est endormi comme un sac et j’ai veillé jusqu’à une heure, tandis que le cabot faisait ses longueurs dans l’étang – un malinois, ça ne dort pas. Je me suis effondré, ma canne accrochée au hamac et balancée par les vents, un sourire aux lèvres.
Six heures zéro zéro : la réalité. Un froissement sourd et continu de paquets de chips résonne de façon assourdissante. Un connard de la base de loisir nous faisait comprendre qu’on n’était pas les bienvenus en vidant toutes les poubelles autour de nous, avec l’énergie d’un vieux frustré. J’ai admiré son jeu de jambe et sa bedaine, et on a plié bagage pendant que Laska terminait son triathlon, trempée. On a payé une tournée de cafés à la buvette pour se faire pardonner et on regoûté aux merveilleux paysages des Vosges.
bien bien on va se mettre alors a la course a pied
à Tours j’ai eu la chance de monter dans un Fouga Magister. Et à Lan Bihoué j’ai visité un beau Neptune 563 en parfait état
Une question, sur votre aérodrome abandonné, il n’y avait pas un Noratlas dans les années 2000?
Moi qui regarde un peu la TV, on voit les avions parfois… C’est un lieu de tournage…
Oui, j’allais le dire.
On a tous notre rôle à jouer.
CAP CANAILLE