Aujourd’hui, c’est exploration urbaine. Nous pénétrons une usine désaffectée, comme la France en compte plus de 3000. Le terme politiquement correct, c’est « friche industrielle ». Témoins de la crise et vestiges de la désindustrialisation, le terme qui vous vient immédiatement à l’esprit, c’est plutôt « zone sinistrée ». Les murs conservent l’ambiance fantomatique d’une ville dans la ville, qui fourmillait de vie, d’activité, et qui n’est plus que silencieux courants d’airs.

Nous poussons la grille d’un ancien complexe de textile et longeons les premiers bâtiments d’un gigantesque parc. Aux aguets, l’urgence c’est de débusquer d’autres visiteurs – et d’identifier le genre. Les tags trônant un peu partout nous rassurent. Dans l’un des édifices, nous trouvons les traces d’un feu. Quinze mètres plus haut, de fines gouttes de pluie s’échappent d’un plafond défoncé. Aucune fenêtre n’a survécu. Dans un immense hangar, six tonneaux de délainage : des barriques en fer et en bois d’au moins deux tonnes. Sur leur côté, un trou par lequel un adulte passe sans problème. A l’intérieur, des rats peut-être.

Au loin, des pas : nous ne sommes pas seuls !

La chienne s’excite ; elle n’est pas méchante mais un boxer, c’est protecteur. Nous courons derrière, bien incapables de rattraper les trois ados qui s’échappent par une clôture, visiblement paniqués.

– On sera pas dérangés pendant la nuit.

A l’étage, Sax trouve un accès permettant de passer dans un autre bâtiment via une poutre – y’ avait rien d’autre. Et de ce second hangar, nous récupérons un casier qui servira d’escalier pour se hisser au troisième étage, muré.

A l’issue, nous ne trouverons rien ! Quelques cadavres d’alcool, des tas de fringues abandonnés, une ou deux vieilles pièces, des francs, et une succession de planchers tremblants. Finalement, la friche n’apportera qu’un abri sûr aux solides fondations – pour les hamacs. Nous nous servirons des grilles d’aération – sous lesquelles passe un bras de la rivière toute proche, sans doute pour le délainage – afin de faire un feu sans risque. Toute la nuit, nous profitâmes d’un orage tonitruant s’abattant sur l’usine.

Une nuit de plus à la belle mais au sec et au chaud, avant de reprendre la route.

Dans d’autres pays, ces sites sont démolis ou conservés après mise en sécurité, afin de les ouvrir au public – en parcs d’attractions, espaces ouverts ou terrains de jeux…

En France, l’Adame consacre 25 millions d’euros pour démanteler ou sécuriser une 20e de sites par an, tandis qu’ils reçoivent 80 dossiers d’usines abandonnées chaque année !

Bilan : Plusieurs morts, souvent jeunes.

A ceux que l’exploration urbaine tenterait, assurez-vous :

  • D’y aller accompagné et d’y avoir du réseau – en cas d’incident.
  • Que les bâtiments tiennent encore debout ! Les intempéries détruisent les toitures, puis les planchers (en 2014, un enfant de 11 ans s’est tué en traversant deux étages du grand séminaire de Luçon, mis en sécurité par un particulier depuis.)
  • Que l’usine ne traitait pas de produits toxiques ou chimiques : ne comptez pas sur les industriels pour passer un coup de balais avant de partir !
  • Que la friche ne soit pas devenue le squat d’individus louches – c’est souvent le cas.

Conclusion : Explorer une usine, c’est bien ; y cacher un crâne, ça craint !

NE METTEZ JAMAIS VOS VIES EN DANGER !

Ce n’est qu’un jeu.

Bonne chasse, camarades.