Les pieds dans les hautes herbes d’une forêt devenue jungle, nous marchons vers le clapotis d’un cours d’eau. Partout autour de nous, de grands arbres s’entrecroisent, emmêlant leurs gigantesques branches – de la taille d’un tronc – et cachant un peu plus la végétation qui nous entoure. Au milieu de cette nature dominante se cache un trésor d’Histoire auquel, peut-être, en ajouterons-nous un autre. Ce n’est qu’après quelques minutes de marches que surgit le premier vestige : immense et imposante, la rocaille d’un mur d’enceinte, camouflé par des siècles de verdure. Le mur s’élève devant nous, prodigieux témoignage d’un temple oublié.

– Rock ‘n’ roll !

Nous poursuivons la marche en longeant ce mur sur Sud – Ouest. Le domaine est immense et totalement avalée par la flore. ‘S’agirait pas de se paumer. Après quelques pas, nous trouvons un petit sentier menant à l’immense porte du monastère… en ruines. De chaque côté, les montants dépassent 3 mètres. La porte, perdue ou ravagée par le temps, n’est plus qu’un immense appel à la curiosité. Sur notre gauche, une poutre cassée est censée aider à traverser le cours d’eau – on s’y risquera plus tard.

Devant, l’inconnu nous appelle. Nous nous enfonçons de nouveau dans la mangrove, machette en main pour nous frayer un chemin au besoin. Et soudain, le cœur du prieuré, gigantesque, pratiquement intact malgré le lierre, les herbes et les arbres qui s’y sont enracinés. La toiture semble encore tenir. Les vastes vitraux de la nef sont brisés. Et après avoir escaladé quelques arbres couchés, nous trouvons l’entrée.

Le cœur de l’église est ravagé. Il a été squatté, à moitié cramé et tagué. Des pierres ont été arrachées. Et pourtant, il demeure magnifique.

Au milieu, les restes d’un grand feu. Sur les murs, les graffitis moquent l’enfer et le paradis. On regarde partout. On retourne les dernières dalles. On creuse la terre. Pas de seringue et une odeur de zamal. De grosses pierres cernent le feu :

– Les squatteurs savent faire.

Sous les bûches, les cendres des feux précédents :

– Et ils reviennent souvent.
– On s’en tape ; tant qu’ils ne savent pas.
– Imagine deux secondes que tes voisins cherchent les trésors en famille et qu’ils tombent sur 3 fumeurs autour d’un feu de camp improvisé…

On revient sur nos pas, frustrés et incertains. Sur le chemin, nous nous perdons. La chienne ne retrouve plus la route et se carapate… à la vue d’une biche. On s’égare un peu plus encore, perdant tout sens d’orientation. Nous marchons, évitant de nous casser la gueule sur des dénivelés qui ne préviennent pas, lorsqu’on se rend compte qu’on ne marche plus sur la forêt mais sur les ruines du prieuré. Nous errons ainsi dans la nuit noire jusqu’à retrouver la départementale qui nous mènera à la voiture. Faudra revenir !

Bonne chasse, camarades.