[dropcap]C[/dropcap]ap sur un site polémique, qui ne fera pas partie de la chasse aux trésors, mais qui recèle probablement des millions de petits trésors : Syam / Chaux-des-Crotenay, dans le Jura. Selon André Berthier, archéologue, c’est ici qu’aurait eut lieu le siège d’Alésia. C’est ici que se serait rendu Vercingétorix. Depuis les fouilles de Napoléon III, Alise-Sainte-Reine en Côte-d’Or (Bourgogne) abrite le site officiel de la bataille, proposé comme le seul, unique et véritable. Berthier avait lu [tooltip title= »historien romain mort seulement 279 ans après Jules César »]Don Cassius[/tooltip], qui lui ne doutait pas : « Vercingétorix attaqua César par surprise chez les Sénaques » ! Soit, en Franche-Comté, où se trouve Chaux-des-Crotenay. Berthier dressa un portrait robot des descriptions précises et détaillées, laissées par Jules César dans sa Guerre des Gaules, correspondant bien plus à Syam / Chaux-des-Crotenay qu’au site d’Alise. Mais toutes les écoles ne s’entendent toujours pas sur le sujet. Pas bien grave ; pour nous, aujourd’hui,…

On mets nos péniches dans les pas d’ César !

[map address= »Chaux-des-Crotenay » type= »terrain » map_style= »default » overlay_color= » » infobox= »default » infobox_background_color= » » infobox_text_color= » » infobox_content= » » icon= » » width= »100% » height= »300px » zoom= »14″ scrollwheel= »yes » scale= »yes » zoom_pancontrol= »yes » popup= »yes » class= » » id= » »][/map]

La guerre des Gaules ne passionne pas tous les Gaulois. Beaucoup reconnaissent que l’invasion a également apporté des routes, des aqueducs (donc « l’eau courante »), ainsi qu’une ouverture culturelle et commerciale sur le monde. Dans ce contexte, Vercingétorix a des tribus alliées et d’autres, ennemies. Pour autant, quand il arrive au nord de l’[tooltip title= »en Franche-Comté, donc ! »]Helvétie romaine[/tooltip], César est mal barré :

D’abord, Julie, sa fille et son principal [tooltip title= »elle était mariée à Pompée, avec qui César tenait en binôme le Sénat et donc, l’Empire »]soutien politique[/tooltip] vient de mourir. Va falloir rentrer en Italie, et dare-dare. Ensuite, quatre mois plus tôt, Gergovie a été une catastrophique défaite pour Rome et une glorieuse victoire pour Vercingétorix (disons « Vergo »), qui se voit réaffirmé dans son rôle de leader. César ne compte plus que 40 000 hommes et Vergo, au moins le double.

Vergo se sent pousser des ailes. Alors il frappe César par surprise, de nuit, enfonçant ses lignes de cavaleries, près d’un [tooltip title= »village préhistorique fortifié »]oppidum[/tooltip] nommé Alésia. Surpris, le général romain envoie ses troupes de mercenaires germains. Les Gaulois ne s’attendaient pas à ça. C’est la branlée. Vergo conduit une retraite à bride abattue dans l’oppidum et y réfugie toutes ses troupes.

On lâche un peu l’Histoire, deux minutes – même si on sait qu’elle va nous revenir à la face. Bonny, la chienne gambade dans la prairie, Sax et moi observons les monticules de pierres, un vieux four à pain de l’oppidum et quelques terrasses naturelles qui dominent des hectares de collines et vallées. Partout, l’herbe est d’un vert presque lumineux. La terre est fertile, ici. Plus bas, il nous semble apercevoir les travées creusées par les Romains et sans doute repérées par André Berthier.

Quelles travées ?

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Avec ses 80 à 90 000 soldats, Vergo se croit à l’abri. Alésia aussi. César en revanche, n’a que peu goûté l’attaque éclair. Redoutant des renforts gaulois il appelle les siens. Puis, le général fait assiéger l’oppidum par une ligne de fortifications (14 kilomètres) faite de pieux, de fossés larges et profonds, de pièges, de lances, de piques et encore d’autres fossés, eux-mêmes piégés. Derrière ses hommes, César établit une seconde ligne de fortifications (20 kilomètres). La même, mais en défense !

Ils déconnaient pas, les Romains !

Sortie de rêves : la chienne aboie. C’est la cata. Elle a déterrée un os et continue à creuser. Nous sommes seuls mais si quelqu’un s’amenait ? Ce site est polémique, nous l’avons dit. On remet Bonny au garde à vous et filons, plus bas, vers les champs. Ici reposeraient des centaines de milliers d’épées. Au plus fort de la bataille, ce serait près de 400 000 hommes qui se déchirèrent. Les experts militaires parlent d’une surface minimum nécessaire de 10 000 hectares…

Les renforts gaulois débarquent : 200 000 soldats. Les combats vont durer deux jours. Les alliés de Vergo tombent d’abord dans tous les pièges mais se battent avec courage. Les troupes germaines de César feront la différence. Les hommes de Vergo, eux, sont affaiblis. Ils ne sortent que la nuit et provoquent autant de pertes qu’ils en subissent. Dans l’oppidum, Vergo lui-même a du mal à coordonner les assauts tout en déplaçant ses machines de guerre. Il s’emmêle les pinceaux face aux habitants d’Alésia qui crèvent de faim, la guerre dans leur jardin.

Vergo tente le tout pour le tout, attaquant d’un coup et de front les fortifications. L’effet de surprise joue en faveur des Gaulois, qui viennent à bout des pièges. Voyant ses lignes sur le point d’être enfoncées, Jules César prend le commandement d’une cohorte et mène l’assaut de la dernière chance. Ses troupes sont galvanisées ; les Gaulois, repoussés… pour la dernière fois.

Durant la nuit, César négocie avec des diplomates gaulois en coulisse, exigeant la livraison des chefs et toutes les armes avant d’accepter une reddition. Et le lendemain matin, Vercingétorix se livre ou est livré par ses frères : « Vercingetorix deditur » pouvant se lire dans les deux sens et les Gaulois d’Alesia ayant jeté leurs armes par dessus leur mur d’enceinte. Contrairement à l’image héroïque du valeureux guerrier gaulois abdiquant dignement aux pieds du conquérant, Vergo lui, a sans doute été amené enchaîné, battu et nu. Ensuite, les versions divergent (encore). L’officielle décrit l’exécution de Vercingétorix, à l’issue du triomphe de Jules César à Rome, ce qui contredit les coutumes plus civilisées de l’Empire à l’égard des chefs vaincus. L’officieuse, que l’on n’entend jamais, prétend qu’il aurait vécu assez longtemps dans une villa romaine pour devenir ami avec César, avant que le Sénat ne le fasse exécuter. Dans tous les cas, Vergo n’aura pas fait de vieux os.

On s’interrompt (encore) :

– Pourquoi on est venu ici, déjà ? J’veux dire ; si ça c’est bien passé ici, tôt ou tard, ça va être classé, quadrillé, sécurisé, flanqué d’archéologues partout !
– Yep’ !
– Donc on est d’accord : qu’est-ce qu’on fait là ? relance le premier.
– Attend, fait l’autre, en dégainant sa boussole, face à l’oppidum.

On se rapproche l’un de l’autre, yeux rivés sur la boussole et notre Fort Alamo national.

– Alors c’est par là ?, rit l’un en regardant à un bout du chemin.
– C’est par là, rit l’autre, se retournant du côté opposé.

Bonne chasse, camarades.